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© Richard Avedon, Buster Keaton, 1952
L’immortalité de Buster Keaton tient dans son regard avait écrit Robert Benayoun dans le superbe ouvrage que ce fleuron de la critique lui avait consacré au début des années 80. Pourtant depuis cette journée de février 1966 ou nous avons appris sa mort, nous le voyons de face, et non de profil.
« Le visage de Keaton est volontiers frémissant, parcouru d’ondes lyriques, sa bouche est agitée, nerveuse, creusée de fossettes qui, tout en évitant le sourire, paraphrasent la bouderie, l’impatience ou même certaines nuances de l’amusement. Du nez long et classique la narine frémit volontiers. Tous ceux qui parlent d’un martien au visage de pierre n’ont jamais vu le visage de Buster, absorbés qu’ils étaient par la parfaite mécanique de son corps. Ils ont analysé les forces en équilibre, le jeu des poulies et des contrepoids souverainement adaptables de sa carrure, sans apercevoir la source même de toute cette vie et l’éclairage unique, subtil et délicat que leur donnait l’expression musicale inépuisable de ses traits. La véritable fixité, le double miracle de la concentration et de la versatilité, il faut les repérer dans son regard. Tout gros plan de Keaton, et il sut admirablement varier la notion de gros plan, vise à nous confronter avec son regard. Buster contemple un obstacle inattendu, et en fixant le centre de l’écran, au-dessus de nos têtes, nous rend cet obstacle, cette surprise inattendue, ce danger ou cette merveille perceptibles au premier degré… Keaton le stupéfieur est un homme à l’œil en forme d’objectif. Il cadre tout, et son immobilité vient alors de ce qu’il s’identifie à tout ce qu’il voit. Il se fond devant nous avec le mur qu’il regarde derrière nous, avec l’église où il attend sa fiancée de commande, avec le film qu’il contemple de sa cabine de projection et qui lui dictera son attitude. D’où cette propension qu’il a, de venir se placer devant nous au centre du cadre, au point de convergence de toute symétrie : on ne le voit de profil que dans les plans de situation où l’on veut le replacer dans le décor, mais, la plupart du temps, il enregistre toute l’action de face, quel que soit le réalisateur qui est censé le diriger. »
© Robert Benayoun, Le Regard de Buster Keaton, Herscher, 1982
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© Bert Stern, Buster Keaton, 1958
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